Al Ahram, 27/03/2004
S’il est vrai qu’il existe un plan d’une dimension psychologique et stratégique, ce serait celui de l’école du terrorisme d’Etat que Sharon a exercé, au nom d’Israël, au cours des trois dernières années. Ce plan vise essentiellement à habituer le monde à accepter ce plan sans aucune réaction tangible.
Si jamais on suit de près le scénario du rôle d’Israël sur la scène palestinienne, on trouvera un plan de destruction basé sur trois axes parallèles :
Premier Axe :
Avorter tout espoir de paix résultant d’initiatives de la part des puissances régionales ou internationales, et d’un autre côté, imaginer des projets israéliens de paix illusoires.
Deuxième Axe :
Détruire toutes les infrastructures de l’Etat palestinien, et liquider les éléments actifs des dirigeants palestiniens.
Troisième Axe :
Usurper de façon ininterrompue des territoires palestiniens, et arracher les plantes des terrains agricoles pour les rendre inféconds dans l’avenir proche.
A propos du Premier Axe :
Sharon n’a pas cessé de déjouer toutes les initiatives de l’ONU et du Conseil de Sécurité d’établir ce qu’on appelait alors la paix fondée sur la justice et le concept des territoires contre la paix, ou l’exécution de la décision 242, exigeant le retour aux frontières de 1967. Depuis lors, des pratiques bafouant la légitimité internationale, ont commencé, sous l’égide, la protection et l’encouragement des Etats-Unis.
D’autre part, des initiatives internationales d’ordre particulier, comme l’initiative franco-égyptienne ont surgi mais n’ont pas duré longtemps. Vint ensuite l’initiative du Prince Abdallah, en tant qu’initiative régionale. Malgré tout le poids de l’Arabie Saoudite, tout l’appui et le soutien moral et intellectuel de l’Egypte et de ses dirigeants, ainsi que celui de la bonne majorité des pays arabes y compris la Palestine, cette initiative ne figure plus sur l’agenda de ceux qui ont voulu mener les initiatives de paix à l’échec.
Et effet, je rappelle au lecteur le projet appelé « Plan MITCHELL» et «les Recommandations TENET» concernant la reprise des négociations de paix.
Evidemment, il y a le projet de « La Feuille de Route » appuyé par les quatre plus grands pays du monde. A présent, Washington l’annonce, de temps en temps, pour calmer l’opinion mondiale, et le gouvernement américain tient encore à « La Feuille de Route » pourtant on a déposé sur cette route la première bombe à retardement, à savoir le mur qu’Israël est en train de construire.
En revanche, Israël s’est précipitée à présenter sur la scène des initiatives unilatérales, c’est-à- dire sans négociation avec les palestiniens, voulant les imposer comme un décret césarien, pour une évacuation incontestée de Gaza et certains remaniements en Cisjordanie. Israël a gardé en secret les détails de cette initiative, qui transgresse toute logique de solution politique du problème en supposant des négociations et y utilisant un langage de charité ; Israël cède des miettes du territoire dont elle s’est emparée en Cisjordanie et Gaza, comme dernière une solution de sa part.
Israël s’attend à ce que les clauses de ses initiatives unilatérales, ses initiatives à solutions insuffisantes et limitées, soient prises en considération et que les autres initiatives internationales et régionales soient interrompues.
Quant au deuxième Axe :
Israël a imposé et habitué l’opinion mondiale et les institutions internationales à la voir mener des raids aériens féroces sur les établissements et les infrastructures des autorités palestiniennes ; voire plus, détenir les policiers palestiniens avant de s’attaquer au symbole de l’Etat palestinien et son Président Yasser Arafat, pour l’assiéger pendant de longues semaines, avant de dire qu’Israël n’a pas encore choisi entre deux options, soit tuer le Président démocratiquement élu, soit l’exiler à l’étranger. Arafat constitue le vrai obstacle aux négociations de paix qu’Israël avait étouffées, tel que je l’ai montré dans les premières lignes.
Il ne faut pas oublier le défi qu’Israël lance aux représentants et chefs de la Communauté européenne, en leur refusant de rencontrer le Président palestinien assiégé.
Je répète, «Israël a habitué le monde à ses crimes et ses provocations» . Qui peut oublier les longues semaines où Israël a assiégé l’Eglise de la Nativité à Bethléem, attaqué ceux qui y étaient, ses soldats au sein de l’Eglise attaquant ceux qui étaient à l’intérieur de l’Eglise, à tel point que les institutions religieuses mondiales ont protesté contre ces actes humiliant les valeurs spirituelles et religieuses. Vint après, le choix criminel et irresponsable du gouvernement de Sharon de liquider les dirigeants palestiniens, l’un après l’autre, par les avions Apache; le monde regardait comme si c’était un film américain de cowboy.
D’ailleurs, le nombre de dirigeants palestiniens tués ou détenus prouve qu’il s’agit d’un plan diabolique pour décapiter l’Etat palestinien et ce avant de se tourner vers les dirigeants du mouvement de résistance afin de les liquider un par un. Enfin, Israël nous surprend par l’assassinat du grand symbole le Cheikh Ahmed Yassine. Sans doute, le choix du temps et du lieu où le Cheikh Ahmed Yassine a été tué, après la prière de l’aube, a aussi pour but de provoquer le monde musulman, et d’affliger les fidèles.
Je m’arrête ici pour dire, franchement, que même si les points de vue divergent au sujet de la légitimité des opérations suicide quand elles visent les civils, néanmoins une réflexion honnête et objective exige des réprobateurs de ces opérations de répondre à cette question cruciale : qui a éteint toute lueur d’espoir chez les Palestiniens et les a mis face à un choix impossible où vie et mort sont sur le même pied d’égalité ?
A propos du troisième Axe:
Il s’agit d’une politique continue d’usurpation de parties des territoires palestiniens, soit sous prétexte de mesures de sécurité, ou bien pour la construction des implantations, pour que le monde et le peuple palestinien s’accoutument à voir la surface de terrain destinée à la création de l’Etat Palestinien, s’amenuiser chaque jour avant de disparaître définitivement, selon les intentions et les ambitions de Sharon.
Il y a d’autres atteintes aux territoires des Palestiniens que je considère comme un crime impardonnable, c’est l’arrachement des oliviers qui privera l’individu palestinien, pour de longues années, d’une des ressources de vie qui le nourrissait et à l’ombre desquels il s’est longtemps abrité. J’accuse ici ceux qui veulent tuer non le présent des Palestiniens mais leur avenir.
Avant de conclure cet article, il m’est important de poser une question au Président de la Maison Blanche:«y a-t-il quelqu’un qui oserait s’interroger sur la légitimité des accords de vente ou de dons d’armes à Israël pour mener des assauts contre les civils, en dehors des buts déterminés dans ce type d’accord?».
Je sais que ma question est naïve, habitué que l’on est à la complicité permanente et inconditionnelle du responsable de la Maison Blanche avec le gouvernement de Sharon. Mais je veux dire par cette question que le tribunal de l’Histoire, quelque soit le temps qu’il mettra, finira par poser des questions aux accusés y compris des questions naïves. Il m’importe également de rappeler à tout le monde un conseil adressé à la conscience mondiale par l’homme sage, le grand expert de Droit International et l’homme de la Cour de Justice Internationale de la Haye, Dr Fouad Riad dans une émission à la télé à laquelle j’ai assisté moi-même :«Ne vous moquez pas de la légitimité internationale, car viendra un jour où l’anarchie du pouvoir règnera avec ses conflits et ses explosions, alors, le monde se souviendra de sa grande erreur d’avoir humilié la légitimité internationale.»
Dans l’Histoire, l’avenir des peuples et des nations ne s’est jamais accompli en trois ou cinq ans. Ma confiance permanente, basée sur la foi et la raison, me dit que le dernier round ne sera jamais en faveur d’Israël. Un jour, Israël payera sa facture d’injustice et de tyrannie.
Leave a Reply