6e Conférence de Doha sur le Dialogue Interreligieux – Doha, Qatar
Les valeurs religieuses : Perspectives en matière de paix et de respect de la vie
16-18 juillet 2008
L’utilisation de la violence, pour obliger un individu ou un groupe à se conformer aux demandes de ceux qui en font usage, doit être rejetée par les individus, les communautés et l’Etat. Cette forme de violence est utilisée pour briser la volonté de la victime et la transformer en un objet en échange d’un gain matériel ou politique. Le fondement de cette pratique vient d’un extrémisme intellectuel et idéologique. Nous pouvons résumer le mode de pensée d’un extrémiste comme un moyen de traiter l’autre comme un objet et de mépriser totalement les idées et les textes auxquels il croit.
Lorsque l’extrémisme proclame qu’il tient sa légitimité de la pensée religieuse, cela relève soit d’un malentendu ou d’une adaptation des textes sacrés pour parvenir à ses objectifs. Cela n’a rien à voir avec un choc des religions. C’est un conflit de pouvoir à motivation politique qui prend la religion en otage pour la manipuler et l’utiliser par des moyens diaboliques pour parvenir à ses fins.
Dans le même temps, nous devons reconnaitre que la pensée extrémiste provient de l’injustice ou de l’oppression, de l’incapacité de jouir de droits légitimes. Personne ne peut mettre en doute le fait que toutes les religions rejettent la violence et appellent à la justice. La violence doit toujours être rejetée mais, de façon à l’éradiquer, nous devons identifier les causes principales qui poussent les gens à de tels extrêmes.
Il est temps de travailler sérieusement à définir légalement l’extrémisme, la violence et le terrorisme de façon à nous permettre de les distinguer du droit légitime de tous les peuples à résister pour restaurer leurs droits usurpés. Dirigeants, écrivains et intellectuels portent la responsabilité de refuser de séparer la paix de la justice.
Ceux qui prônent ou gouvernent par la tyrannie, l’injustice, l’oppression et la négation des droits des autres, ne devraient pas bénéficier de notre appel à la paix et à la coexistence. « Le respect de la vie », thème et but de la deuxième partie de notre réunion de ce jour, ne pourra être atteint que si nous réussissons à établir une vraie justice pour les peuples et à respecter leur droit à la dignité et à la souveraineté.
Il y a beaucoup à dire sur la relation entre les medias et la violence et je voudrais en résumer les points suivants:
1. Les medias aujourd’hui constituent l’arme la plus dangereuse, pourtant les medias pourraient être l’école qui apprendrait au public à rejeter l’extrémisme, la violence et le terrorisme. Les medias ont également la possibilité d’atteindre des millions de personnes et de les informer à un niveau qui ne pourra jamais être égalé par des exposés et conférences
2. Sans respect des principes, les medias peuvent exacerber les émotions et tromper les masses, les incitant potentiellement à la violence. Les medias deviennent alors aussi dangereux qu’une arme nucléaire pour tuer les innocents.
3. Au cours des dernières années, nous avons vu comment les sentiments des peuples ont pu été excités de façon négative par un article de presse, des photos ou un film, perçus comme profanant leurs valeurs et symboles religieux. Des personnes sensées doivent avec sérénité trouver un équilibre intelligent et objectif entre, d’un coté, liberté d’opinion, de pensée et d’expression, et de l’autre coté, définir la ligne rouge qu’il convient de ne pas franchir pour respecter et protéger les symboles et valeurs des différents peuples.
Il y a deux ans, ici même, j’ai lancé un appel pour inviter une vingtaine de journalistes internationaux occidentaux et une vingtaine d’experts en matière de religion et de culture à participer à une table ronde pour jeter les bases d’une charte de principes d’une réconciliation potentiellement historique de la liberté d’expression avec le droit des peuples à voir leurs valeurs et symboles respectés.
Avant de conclure, et dans la mesure où nous sommes dans une conférence sur le dialogue interreligieux, je voudrais dire que le dialogue est à la croisée des chemins et requiert un nouveau langage et un nouveau style. Sinon, nous aurons échoué.
Nous devons:
• Reconnaitre que le dialogue, jusqu’a présent, n’a pas réussi à transmettre son message de respect mutuel à un large public.
• Comprendre que le dialogue ne sera effectif que si chacun de nous n’hésite pas à choquer les siens ou les gens en général, et à insister vigoureusement sur le droit à la justice pour tous les peuples, y compris le respect de leurs droits.
• Considérer que le dialogue interreligieux et le dialogue interculturel font partie d’un tout, en particulier au niveau des peuples.
Le manque de compréhension de la culture de l’autre est l’une des sources de conflit et de violence. Il est temps pour les adeptes des trois religions monothéistes de dire «nous savons que nous ne sommes pas les seuls croyants et qu’il existe d’autres religions et spiritualités dignes de ce nom ». Il est temps de tendre la main pour la coopération, la fraternité et la compréhension mutuelle, sachant que la stabilité, la liberté et le bonheur sont les objectifs principaux.
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