Conseil Supérieur des Antiquités – Le Caire
13 décembre 2010

Après de nombreuses années consacrées à promouvoir le dialogue interreligieux et à participer à des conférences internationales de New York à Vienne et à Madrid, je suis convaincu que le dialogue des cultures prend de plus en plus d’importance. Ma conviction que le dialogue interreligieux ne devrait pas être séparé du dialogue des cultures est telle qu’en 2010 j’ai demandé à l’Assemblée Générale de l’Association que je préside, ADIC, d’adapter nos activités et d’ajouter le dialogue des cultures au nom de l’association. Elle porte dorénavant le nom de « Union Internationale pour le Dialogue Interculturel et Religieux et l’Education de la Paix ».

Cette association a été créée en France en 1989 en tant qu’ «Association pour le Dialogue Islamo-Chrétien». Lorsque je fus nommé président en 1995, j’ai tout d’abord cherché à en changer le nom pour inclure le dialogue avec les Juifs. Feu Sheikh d’Al-Azhar, Gad El Haq Aly Gad El Haq, une grande figure marquante de l’histoire de l’Islam dans notre pays, m’a encouragé à suivre cette voie. Il m’a dit : Ne confondez pas l’agression israélienne contre nous avec le fait que les trois religions issues d’Abraham sont étroitement liées. Nous devons faire la distinction entre le contenu des religions et la façon de se comporter de certains adeptes des religions ».

J’ai pris conscience de l’importance grandissante de l’élément culturel dans le cadre du dialogue interreligieux. Lors de l’une des réunions du Comité Permanent d’Al-Azhar pour le Dialogue Interreligieux et sa contrepartie au Vatican, le président du Comité d’Al-Azhar, Sheikh Fawzi El Zefzaf et moi-même, avons soumis un document de travail visant à rejeter la généralisation en matière de jugements. Cette initiative a eu un impact positif et notre document a fait l’objet de discussions à la Faculté de Théologie du Vatican et a été ajouté à leurs références.

D’un point de vue pratique, il est souvent dit que les gens en Occident commettraient une erreur d’étendre leur jugement sur Ben Laden et les crimes qu’il a commis à tous les Musulmans. C’est aussi valable pour nous. Par exemple, malgré le fait que nous désapprouvons les déclarations du Pape Benedict XVI au sujet de l’Islam, cela ne devrait pas être une excuse pour généraliser et condamner tous les Chrétiens.

N’est-il pas important de savoir, par exemple, que les Chrétiens d’Orient ont soutenu les Sarrazins pendant les Croisades contre les Francs qui envahissaient leur terre ? Et c’est un fait historique que, bien que le Vatican faisait partie de ceux qui étaient à la tête des Croisades, le Catholique Saint François d’Assise était l’un des opposants aux Croisades et est même allé jusqu’à voyager en Egypte pour demander au roi d’arrêter l’effusion de sang.

J’aimerais partager avec vous quelques actions que j’ai initiées ces deux dernières années, en Espagne, en particulier à Cordoue, ville qui a été le témoin de l’âge d’or de la coexistence entre les religions.

Le 25 juillet 2010, notre association signait un accord avec Nexos Allianza, affiliée à l’initiative de l’Alliance des Civilisations des Nations Unies, pour mettre en œuvre un programme qui va au cœur du sujet qui est le notre aujourd’hui. Les grandes lignes de cet accord sont les suivantes:

1. Organiser une rencontre entre jeunes, représentants de l’avenir, de différentes religions et races tout d’abord à Cordoue, puis en Egypte, pour affirmer leurs valeurs communes.

2. Mettre en évidence l’importance de la musique pour rapprocher les gens en organisant 2 concerts : en Egypte avec le Flamenco et à Cordoue avec le célèbre groupe musical islamo-chrétien dirigé par Entessar Abd El Fattah

3. Mettre en avant le rôle que peuvent jouer les medias en faisant connaitre l’exemple historique de coexistence joué par Cordoue en invitant un groupe de journalistes égyptiens, Arabes et européens à Cordoue pour parfaire leur connaissance.

4. Promouvoir le modèle économique prôné par Parque International de la Paz Euromediterraneo auprès de potentiels partenaires industriels égyptiens et arabes de façon qu’ensemble, avec le peuple de Cordoue, ils puissent confirmer leurs buts communs de coexistence pacifique.

Le mois dernier, le ministère des Affaires Etrangères a demandé à Dr. Abdel Aziz Hegazi, président de la Fédération Générale des Associations non gouvernementales, de préparer des propositions pratiques pour créer un vrai dialogue des cultures et de les proposer à Malte lors du premier sommet Euro-mediterranée en Novembre 2010. Il a été demandé à notre organisation non gouvernementale française, reconnue par les ministères des Affaires Etrangères et de l’Intérieur égyptiens, de contribuer à cette présentation. Nous sommes maintenant heureux de dire que nous travaillons à créer un lien nouveau entre la société civile et le dialogue des cultures et des civilisations.

Enfin, j’aimerais vous parler d’une autre initiative à laquelle je travaille, visant à lier culture et éducation. J’ai rencontré à maintes reprises le ministre de l’éducation, Dr. Ahmed Zaki Badr et Dr. Mahmoud Hamdi Zaqzouq, Ministre des biens religieux, pour discuter de la révision des textes des manuels scolaires du secteur public. Au cours de ces discussions, j’ai souligné l’importance d’intégrer aux manuels scolaires les valeurs de coexistence pacifique, de tolérance et d’amour entre les adeptes des différentes religions. Il est de notre devoir de protéger les nouvelles générations de l’extrémisme idéologique qui, non seulement détruit toute chance de dialogue mais contribue à déclencher toutes les formes de violence.