Peter Wiederud, Directeur de l’Institut suédois d’Alexandrie, a organisé une rencontre avec Aly El Samman, ancien conseiller du Président Sadate, Président de l’Union Internationale pour le Dialogue Interculturel et Religieux et l’Education de la paix (ADIC), avec des membres du Comité permanent du Ministère des Affaires étrangères du Parlement suédois, avec à sa tête Mr. Kenneth G. Forslund, Président du Comité.
Peter Wiederud, présentant Aly El Samman, tour à tour journaliste, conseiller pour l’information auprès du Président Anouar El Sadate, pionnier du dialogue interreligieux, a annoncé les points qui seront développés au cours de la soirée, notamment la rencontre à Rome entre S.S. le Pape François II et le Grand Imam d’Al-Azhar Sheikh Al-Taieb le 23 mai 2016, le dialogue des cultures et le dialogue des religions mais également les accords de paix de Camp David, le voyage de Sadate à Jérusalem, les personnalités qui l’ont marqué.
Traitant du premier point de cet échange, Aly El Samman a souligné que la rencontre entre le Pape François II et le Grand Iman d’Al-Azhar Sheikh Al-Taieb concrétisait le retour du dialogue entre ces deux grandes institutions, après une interruption de 5 ans, suite au discours prononcé à Ratisbonne le 12-09-2006 par le Pape Benedict XVI, discours qui avait alors provoqué des réactions négatives de la part de feu le Grand Iman d’Al-Azhar Sheikh Sayed Tantawi. Considérant cette rencontre comme venant à point nommé pour contrecarrer les violences et le fanatisme venant de l’ignorance, danger le plus grave auquel notre époque se trouve confrontée.
Avant de traiter de l’historique des relations entre le Vatican et Al-Azhar, El Samman a tenu à préciser à cet égard le rôle joué par l’ADIC, rappelant que l’association a été créée en 1989 par feu le Dr Adel Amer ex-directeur de la Ligue des Etats arabes à Paris et le Père Michel Lelong, père blanc, sous la dénomination Association pour le Dialogue Islamo-Chrétien et les Rencontres Interreligieuses (ADIC). Suite au décès de Dr Amer en 1993, Dr Aly El Samman, avocat et membre du Conseil Supérieur Islamique d’Egypte, prit la relève et préside l’association depuis lors. Il a œuvré à élargir d’abord le mandat de l’organisation au dialogue avec le judaïsme. Puis, devant la diversité des activités de l’ADIC, l’association opta finalement en 2010, pour le nom sous sa forme actuelle, tout en gardant le même acronyme, largement reconnu dans les milieux religieux ADIC.
Mais, dès 1994, l’ADIC a été à l’origine d’une rencontre à Berne Suisse en Avril entre le Cardinal Franz Koenig, Cardinal de Vienne Autriche, membre du Sacré Collège du Vatican et de feu le Grand Imam d’Al-Azhar Sheikh Gad El Haq Aly Gad El Haq, rencontre qui a ouvert la porte du dialogue entre ces deux grandes institutions.
Ensuite l’ADIC a organisé une conférence à La Sorbonne à Paris en juin de la même année en présence du Cardinal Koenig, de l’ancien Grand Rabbin de France René-Samuel Sirat et Dr Zagzoug, Doyen de la Faculté de Théologie d’Al-Azhar. Ce n’est que 4 ans après ces initiatives et des négociations laborieuses entre le Conseil Pontifical pour le Dialogue Interreligieux du Vatican et le Comité Permanent d’Al-Azhar pour le Dialogue avec les Religions Monothéistes, qu’un accord historique a été signé le 28 Mai 1998 au Vatican, créant un Comité conjoint pour le Dialogue.
Cet accord, reconnaissant le rôle joué par l’ADIC, a été signé respectivement par le Cardinal Arinze, Président du Conseil Pontifical pour le Dialogue Interreligieux, Monseigneur Michael Fitzgerald, secrétaire de ce Conseil Pontifical pour le Dialogue Interreligieux, et par Sheikh Fawzi El Zefzaf, Président du Comité Permanent d’Al-Azhar pour le Dialogue avec les Religions monothéistes et par moi-même, alors Vice-président de ce Comité Permanent et ce, en présence de feu le Pape Jean-Paul II. Par la suite, il y a eu la visite historique le 24 février 2000 de feu le Pape Jean-Paul II à Al Azhar au Caire où il été accueilli par feu le Grand Imam Sheikh Sayed Tantawi.
Après cet accord entre le Vatican et Al Azhar, Al-Azhar a par la suite signé un accord avec l’Eglise Anglicane, et poser les fondements d’une coopération. Ainsi, furent organisées plusieurs visites entre l’archevêque de Canterbury et le Cheikh d’Al-Azhar de 1995 à 1999. Ces réunions, aboutirent le 11 septembre 2001, à la signature d’un accord à Lambeth Palace à Londres, entre Lord Carey, archevêque de Canterbury, président de l’Eglise anglicane et feu le Grand Iman d’Al-Azhar, Sheikh Sayed El Tantawi, pour la création d’un comité conjoint pour la promotion du dialogue en vue de la paix et la lutte contre l’injustice. Cet accord ayant été également signé par le Révérend Dr. Mounir Hanna, Evêque d’Egypte et d’Afrique du Nord, du Révérend chanoine Dr. Christopher Lamb et par Sheikh Fawzi El Zefzaf, Président du Comité Permanent d’Al-Azhar pour le Dialogue avec les Religions Monothéistes et par moi-même alors Vice-président de ce Comité Permanent.
Puis, venant à la relation entre le dialogue interculturel et interreligieux, il a mis en avant le fait que le dialogue des cultures est source d’enrichissement pour le dialogue des religions, ouvrant ainsi une meilleure compréhension entre ces deux formes de dialogue, leur conférant un sens plus élargi. Dans ce contexte, El Samman a fait référence à son enfance et combien fut grande l’influence qu’eut sur lui sa scolarité dans une école orthodoxe copte, où il commença par être le seul enfant musulman.
Passant au point portant sur les accords de paix de Camp David et la visite du Président Sadate à Jérusalem, El Samman a relevé combien il a eu la chance d’être choisi par le Président Sadate le Ier aout 1973 pour devenir son conseiller pour l’information extérieure, rôle surtout important lors du déclenchement de la guerre d’Octobre 1973 avec Israël, et ce notamment à partir de Paris pour continuer la mission d’information auprès de l’opinion publique française et européenne et en organisant, à la demande du Président Sadate, une rencontre avec des personnalités juives de premier plan ayant eut une place dans l’histoire du peuple juif, lors de sa visite officielle en France, invité par le Président Giscard d’Estaing, alors qu’il était en route pour Camp David aux Etats Unis. Conseillé par le Chancelier d’Autriche Bruno Kreisky, El Samman a invité Nahum Goldman, ancien Président du Congrès juif mondial ; le banquier Français Baron Edmond de Rothschild ; le banquier anglais Sir Sigmund Warburg Président de la Banque Warburg ; le banquier autrichien Karl Kahane Président du Groupe Montana, à cette rencontre avec le Président Sadate, qui s’est tenue au Palais de Marigny a Paris.
A Camp David, El Samman a souligné le fait que l’humour a joué un grand rôle dans les négociations de paix, rappelant que le Président Sadate lui avait expliqué que lors des discussions avec Begin, il lui avait confié qu’il ne pensait pas que les négociations allaient aboutir vue que même Moise n’y avait pas réussi. Il a également rappelé les efforts infructueux du Président Sadate pour que ces négociations concernent le monde arabe et a salué le rôle éminent du Président Jimmy Carter alors que les négociations piétinaient. Insistant sur le fait que le voyage d’Anouar El Sadate à Jérusalem et son discours à la Knesset avaient constitué un tournant principal, El Samman a souligné que le texte de ce discours devrait être inclus dans les programmes scolaires comme partie importante de la culture de l’histoire pour que les jeunes puissent inclure dans leur savoir et connaissance cette leçon inoubliable qui est un modèle dans la politique universelle pour le courage demandé aux hommes d’état.
Pour conclure, El Samman a parlé des belles rencontres et amitiés profondes qui ont marqué son parcours en Egypte, en Europe, en France et aux Etats Unis, à savoir, hormis les personnalités ci-dessus mentionnées, le Président Pierre Mendes-France; James Wolfensohn, ancien Président de la World Bank ; André Ulmann, Directeur du journal « la Tribune des nations » ; Maxime Rodinson ; Jean-Paul Sartre ; Simone de Beauvoir ; Claude Lanzmann ; et sans oublier Jean Lacouture qui a joué un rôle décisif dans sa carrière de journaliste.
La soirée s’est terminée par un dialogue chaleureux au cours duquel fut mise en avant la nécessité de mieux promouvoir le dialogue interculturel et poursuivre le combat contre l’ignorance et la discrimination, afin d’éduquer les jeunes à la tolérance et au dialogue tant à l’étranger qu’au Moyen-Orient.
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